Meurtres de Nantes : les questions sans réponse
Jeudi, une découverte macabre a été faite à Nantes : les corps d'une mère de famille et de ses quatre enfants ont été retrouvés enterrés sous la terrasse de la maison familiale, après avoir été tués "vraisemblablement par arme à feu".Vendredi, des traces du père de famille, principal suspect des cinq meurtres, ont été identifiées dans le Var : sa voiture a été trouvée sur le parking d'un hôtel de Roquebrune-sur-Argens, et "une trace bancaire" a été enregistrée dans la même ville le 14 avril.
- Que s'est-il passé ?
Jeudi 21 avril, à Nantes, les corps d'Agnès Dupont de Ligonnès, 48 ans, et de ses quatre enfants – Arthur (20 ans), Thomas (18 ans), Anne (16 ans) et Benoît (13 ans) – sont retrouvés enterrés sous la terrasse de la maison familiale. D'aprèsXavier Ronsin, le procureur de la République de Nantes, ils auraient été tués"vraisemblablement par arme à feu". Il précise que "l'enquête pour 'disparition inquiétante' bascule vers 'séquestration et assassinat'". Le père de famille, Xavier (50 ans), est le principal suspect. La famille Dupont de Ligonnès avait mystérieusement disparu début avril.
Jeudi, les enquêteurs ont d'abord trouvé un reste de jambe sous la terrasse de la maison, puis un premier corps. Les quatre autres corps ont été exhumés par la suite, "entiers et non découpés", ainsi que les deux labradors de la famille. D'après une source proche de l'enquête citée par Le Parisien, "tous n'ont peut-être pas été tués par balle. Des éléments (témoignages des voisins) indiquant que le père a procédé à l'achat d'une pelle, de sacs de couchage et de chaux, quelques jours avant les faits, ont été recueillis." Les premiers éléments de l'autopsie indiquent que les corps avaient été soigneusement enterrés dans des sacs de jute et avec de la chaux vive.
La suite de l'autopsie a révélé qu'Agnès et Thomas, 18 ans, présentaient "deux orifices d'impact d'arme à la tempe", probablement de 22 long rifle, "arme connue comme ayant appartenu à Xavier Dupont de Ligonnès".
- Où se trouve le père ?
Vendredi, la voiture de Xavier Dupont de Ligonnès a été retrouvée sur le parking de l'hôtel Formule 1 à Roquebrune-sur-Argens, près de Fréjus (Var). "Le 15 avril, après une nuit au Formule 1, il a quitté seul sa chambre et abandonné à proximité son véhicule qui depuis, n'a pas été touché", explique le procureur. Par ailleurs, il a effectué un retrait par carte bancaire de 30 euros à Roquebrune-sur-Argens le 14 avril. Il aurait été aperçu dans la Haute-Garonne avant d'arriver à Pontet (Vaucluse), le 13, où il a dîné seul et dormi dans une auberge.
La famille Dupont de Ligonnès a vécu dans le Var avant de s'installer en Loire-Atlantique. Famille a priori sans histoire, les Dupont de Ligonnès n'étaient pas connus des services de police. Les premiers éléments d'enquête semblent indiquer des problèmes d'argent dans le couple, mais aucun autre mobile possible n'est pour l'instant évoqué. D'après Presse-Océan, un huissier avait été mandaté au début du mois d'avril pour venir réclamer une créance de plus de 20 000 euros au domicile de la famille.
- Que sait-on des dernières heures de la famille Dupont de Ligonnès ?
Les témoignages des voisins laissent penser que la famille était en vie au moins jusqu'au 7 avril. Un voisin, interrogé par la police, aurait vu Xavier Dupont de Ligonnès dans la journée du 7 avril en train de faire "des allers-retours, les bras chargés de cabas" entre sa voiture et sa maison, pendant plus d'une heure. Un témoignage qui pourrait donner du crédit à la thèse d'un scénario anticipé.
Peu avant sa disparition, la famille avait laissé des messages, que le procureur a qualifié de "délirants et contradictoires". Alors que la mère de famille avait évoqué auprès de son entourage et des établissements scolaires de ses enfants une mutation soudaine en Australie, la police a retrouvé une lettre du père, adressée à des proches, dans lequel il explique être "un agent secret pour le compte des Etats-Unis" et avoir été contraint d'assister à un "important procès lié à la drogue".
Les volets de la maison familiale étaient fermés, toutes les armoires vidées et sur la boîte aux lettres, un message indiquait : "Courrier à retourner à l'expéditeur. Merci." Aux abords de la maison, sur une voiture identifiée par des voisins comme étant celle de la mère, un message était écrit à la main, sur le pollen qui recouvrait le véhicule : "T'avais pas le droit. Tu nous manques. PK."
- Y a-t-il un lien avec la femme disparue dans le Var ?
Colette Deromme, une quinquagénaire domiciliée à Lorgues (Var), a disparu depuis le vendredi 15 avril. Ce jour-là, cette mère de quatre enfants ne s'est pas présentée au supermarché dans lequel elle travaille et n'est pas allée chercher sa fille à l'école. Dimanche, le parquet de Draguignan a ouvert une enquête pour "disparition inquiétante ou suspecte d'un majeur" (lire l'article de Var-Matin).
La présence de Xavier Dupont de Ligonnès dans la région éveille les soupçons, d'autant que lui et sa famille ont habité, a priori avant 2003, à Lorgues. Vendredi, en début d'après-midi, le procureur a parlé d'une "coïncidence entre la date de passage dans la région de Xavier Dupont de Ligonnès et la date de la disparition."Mais "rien à ce jour" n'est encore établi, a précisé le procureur.
- Que sait-on de la famille Dupont de Ligonnès ?
La personnalité de Xavier Dupont de Ligonnès, né à Versailles, interroge. Depuis 2003, il est le gérant et unique employé d'une société, la Selref, installée à Pornic (Loire-Atlantique), qui propose à des restaurants et des hôtels de figurer sur des guides touristiques, mais à en croire les témoignages, son activité précise semble floue. A la fin des années 1990, il fonde une association, La Route des commerçants, une sorte d'agence de voyages pour VRP. Très souvent absent de la demeure familiale "pour des raisons professionnelles", cet homme brun aux cheveux courts, visage rond et lunettes métalliques, issu d'un milieu très catholique, est décrit par ses voisins comme quelqu'un de courtois et discret. Une enquête de personnalité approfondie est en cours actuellement.
Très croyante, Agnès, sa femme, donnait des cours de catéchisme et travaillait parfois comme surveillante à Blanche-de-Castille, une école privée nantaise. Ses proches décrivent une femme charmante en public mais pouvant se montrer très autoritaire avec ses enfants. Son aîné, Arthur, qui préparait un BTS en Vendée, "ne supportait pas le climat familial", selon un de ses amis interrogés par Le Parisien.
Ce qui surprend chez cette famille discrète, ce sont les très nombreux déménagements : Xavier et Agnès auraient vécu à Draguignan, Lorgues, Sainte-Maxime (Var), Vaison-la-Romaine (Vaucluse) et Pornic (Loire-Atlantique), avant de s'installer à Nantes.
Un appel à témoin a été lancé pour recueillir "tout indice et témoignage utile". Le commissariat de Nantes a mis en place un numéro de téléphone : le 02 53 46 74 20.
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